Les Maires de St Illide

Titre le plus connu et fonction la plus respectée des élus de la république.
Dans les 34.945 communes de France (2023), le maire est partout identifié comme le représentant légitime de la collectivité et le principal responsable de sa gestion et de son destin.

Les communes ont été créées dès les premiers mois de la Révolution, en décembre 1789.

Au nombre de 44.000, elles remplacent les paroisses et les seigneuries, marquant la disparition de toute autorité religieuse et aristocratique sur la population.

Jusqu'en 1800, la commune est dirigée par un agent municipal ou un officier public, accompagné du commandant de la Garde Nationale, dans les communes où celle-ci existe (c'est le cas de St Illide).

Ce sont dans tous les cas des élus au suffrage censitaire.

En 1800, le titre de maire apparaît mais ce n'est plus un élu. Il est nommé par le préfet dans les communes de moins de 5.000 h et par le pouvoir central dans les villes plus importantes.

Ce mode de désignation non démocratique subsistera jusqu'en 1884, sauf une courte parenthèse après la révolution de 1848.

Jusqu'en 1867, le maire exerce seul l'administration de la commune. Il ne consulte le conseil municipal que s'il le juge utile.

C'est seulement depuis 1884 que le maire est désigné par le conseil municipal élu au suffrage universel à 2 tours.

La durée de son mandat, initialement de 4 ans, est portée à 6 ans en 1929.

A St Illide, comme dans toutes les communes de France, les maires se sont donc succédés sans interruption de 1800 jusqu'à nos jours.

En 223 ans, 17 maires ont été élus à St Illide, soit une moyenne de durée mandat proche de 15 ans par maire, signe d'une remarquable stabilité.

 

I - Le site de St Illide - Wikipédia présente la liste des sept maires de St Illide de 1929 à nos jours.

L'actuel maire, Jean Pierre Cinqualbres, a été élu en mars 2020.

Son prédécesseur, le docteur François Lachaze, médecin généraliste à St Illide a rempli 3 mandats consécutifs de 2001 à 2020 et sera élu conseiller général du canton de St Cernin de 2011 à 2015 (1 mandat).
Le Dr Lachaze vit actuellement à St Illide.

Tous les maires qui l'ont précédé sont aujourd'hui décédés.

Le premier cité sur le site Wikipédia est Léon Fleys.
Maire de 1929 à 1940 (deux mandats), au début de la seconde guerre mondiale, Léon Fleys est à nouveau réélu à la Libération, en 1945 et n'occupera cette charge qu'une seule année.

Il a alors 72 ans et décide de se retirer après une longue et brillante carrière qui en fait certainement le plus illustre parmi les maires de St Illide, sans ôter aucun mérite à ses pairs.

Léon Fleys est né en 1874 à Aurillac. Après une carrière d'avocat, il choisit la magistrature et occupe rapidement de hautes fonctions administratives et judiciaires. Directeur du cabinet d'Alexandre Millerand, président de la république de 1920 à 1924, qui viendra lui rendre visite à St Illide, il est nommé en 1919 au poste délicat de directeur des services judiciaires d'Alsace-Lorraine redevenue française après 47 ans sous le régime allemand.

Directeur de l'administration pénitentiaire, puis des affaires civiles et du sceau, il termine sa carrière à la cour de cassation dont il est nommé à sa retraite en 1944, premier président honoraire.

Il siégera encore quelques années au conseil supérieur de la magistrature.

M . Fleys décède en 1965 à St Illide où il reçoit les honneurs militaires en sa qualité de grand officier de la Légion d'Honneur avant qu'un hommage solennel lui soit rendu en présence du garde des sceaux.
Il est inhumé à St Illide où vivent actuellement plusieurs de ses petits-enfants.
Léon Fleys est donc le premier des trois maires à connaître la guerre 1939-1945, le régime de Vichy puis l'occupation allemande et enfin la Libération.

Lui ont succédé Edouard Bastid de 1940 à 1943 et Paul Cinqualbre de 1943 à 1945.
Ils méritent tous les trois, qui d'ailleurs s'entraidèrent pendant cette période si difficile, toute notre estime

Période difficile en effet qui les voit en contact permanent avec leurs administrés auxquels ils doivent soutien moral et l'exemple d'un dévouement de tous les instants.

Ils ont face à eux une administration acquise aux idées de la collaboration et notamment François Coldefy préfet du Cantal de 1940 à 1942 et surtout son successeur Roger Homo de 1942 à février 1944, fonctionnaires zélés, appliquant sans nuances les ordres de Vichy et des autorités allemandes après l'occupation de la zone sud en novembre 1942.

Le premier sera révoqué à la Libération, le second, violemment anti-sémite et anti-communiste, fervent partisan du STO (service du travail obligatoire), sera condamné à mort par contumace par la cour de justice du Cantal en 1945.

St Illide connaît en février 1943, la 2éme grande rafle des juifs dans le département, sans doute sur dénonciation car elle est la seule commune concernée à l'ouest d'Aurillac. Un juif, réfugié dans la maison Limbertie parvient à se sauver, est accueilli quelques jours par Agathe Darnis dans la maison Lapierre avant de fuir plus loin.

Les juifs sont peu nombreux dans le département en 1941, moins de 500 selon le recensement du préfet Coldefy, mais leur nombre augmentera avec le reflux des juifs poursuivis en zone nord. Ils sont l'objet de l'hostilité de la presse, notamment de "La Croix du Cantal" très influente, dans les milieux catholiques. Dès lors, les dénonciations, voire les pétitions demandant le départ des juifs sont hélas, nombreuses dans le département.

Les allemands sont aussi très présents et les maires de St Illide doivent les affronter à plusieurs reprises, redoutant toujours des pillages ou des exactions. La commune doit ainsi assister à la torture par les allemands de deux résistants puis, en 1944, subir le choc d'une scène aussi odieuse infligée, place de l'église, à un "collaborateur" par "des "résistants".
On évoquera aussi les nombreux réfugiés qu'il faut prendre en charge et particulièrement en 1943, les "petits marseillais" pour les protéger des bombardements alliés en Provence. St Illide en recevra une quinzaine qu'il faudra héberger et scolariser.
Il reçoit aussi à l'hospice d'Albart et sauve la vie de plusieurs malades mentaux hospitalisés à Aurillac et menacés, comme dans toute la France,de mourir de faim tant leur alimentation "hypocalorique" est insuffisante. On estime qu'en France la moitié de ces malades internés dans les asiles, mourra à partir de 1941, victime d'un eugénisme latent.

Au total, la population du Cantal augmente d'environ un quart et le même ratio peut s'appliquer à St Illide, soit environ 300 personnes supplémentaires en 1943-1944.
Des maisons sont réquisitionnées ainsi que l'essentiel de la production agro-alimentaire, les habitants sont contraints de participer aux efforts de solidarité alors que dans le même temps les rationnements se développent, touchant d'abord l'alimentation puis, à partir de 1942, tous les produits (essence, textiles, chaussures, papeterie, tabac, etc.). Tout ceci impose une bureaucratie tatillonne, exaspérante, tandis que l'économie s'effondre ainsi que l'agriculture, faute de bras. Les prisonniers sont nombreux et le STO institué en 1942, est strictement appliqué malgré son impopularité.
En 1942, la ration alimentaire est officiellement de 1.100 calories/jour, soit la moitié de la norme admise pour un adulte actif. Le marché noir prospère et la solidarité familiale s'organise.

Le maire est bien seul face à toutes ces difficultés, seul aux prises d'une population inquiète, mécontente et humiliée, seul face aux autorités, parfois face à l'occupant, comme il l'a déjà été pendant les guerres précédentes (1814, 1815, 1870, 1914-1918).

Le calme revenu et l'ordre républicain rétabli, nos trois maires ne feront l'objet d'aucun grief contrairement à tellement d'autres élus en France, poursuivis pour compromission, abus de pouvoir et autres faits délictueux ou de collaboration.
Les habitants de St Illide, ne leur feront non plus aucun reproche et les intéressés poursuivront paisiblement leur vie dans la commune, entourés du respect de tous. Deux d'entre eux seront d'ailleurs réélus.

Trois maires en seulement quatre ans ! c'est bien le signe et la conséquence d'une grave crise.

M. Fleys devait en 1940 rejoindre ses hautes fonctions judiciaires à Paris où sa présence était requise. Il savait qu'un républicain confirmé lui succédait à la mairie, en la personne d'Edouard Bastid.

Ancien instituteur d'école laïque, M. Bastid vit dans le bourg de St Illide, dans une maison située en face de la belle demeure Malvezin-Fleys. Bien avant la guerre, il s'est associé avec un parent pour créer chez lui un commerce de vins en gros auquel il adjoindra en 1939, la fabrication et la vente de charbon de bois, substitut de l'essence pour les véhicules équipés d'un gazogène.

Elu maire en 1940, Edouard Bastid est un maire respecté qui affronte avec sang froid et dignité les difficultés de l'heure.
Il vit près de trois années épuisantes et de problèmes incessants avec l'administration préfectorale. Aussi choisit-il en 1943, de laisser la place à Paul Cinqualbre, connu de tous pour sa pondération et sa bonté.
Edouard Bastid finira sa vie dans sa maison de St Illide où son petit-fils Jean-Marc vient fréquemment avec sa famille.

Paul Cinqualbre est un ancien combattant, blessé de la guerre14-18 dont il garde un handicap important.
Vivant dans sa maison familiale au village du Bel-Air, il a 51 ans lorsqu'il est élu maire. D'une vieille famille de St Illide où il est né, il connaît bien les habitants de la commune et porte un regard bienveillant sur chacun.
D'un tempérament conciliant, "débonnaire" dit-on souvent, il tente de s'adapter aux circonstances et de protéger ses administrés.
Il doit subir encore une année l'activisme du terrible préfet Homo avant que les allemands ne quittent le Cantal en août 1944, après la désastreuse bataille, mal préparée et mal conduite, du Mont Mouchet en juin 1944.

Puis c'est la fin des réquisitions, le retour des prisonniers, le départ des réfugiés, mais le maintien d'un rationnement strict qui ne prendra complètement fin qu'en 1949 avec les effets du Plan Marshall.

Paul Cinqualbre sera réélu de 1946 à 1953, devra laisser sa place à Gabriel Dutrevy pour le mandat suivant et connaître un troisième puis un quatrième mandat de maire de 1959 à 1971. Il a alors 79 ans et prépare depuis plusieurs années sa succession. C'est donc tout naturellement que son adjoint, Raymond Verniole reprendra le flambeau.
Paul Cinqualbre décède quelques mois plus tard à St Illide à l'âge de 80 ans, en juiller 1972.
Voir photos de Paul Cinqualbre sur notre site : photos conscrits, classes 61 et 66.

Gabriel Dutrevy, ancien employé de commerce, est retraité lorsqu'il est élu maire en 1953 pour un mandat de six ans.
Il a alors 63 ans et habite dans sa maison située au carrefour des routes de St Cernin, Pleaux et Labontat. Cette maison sera ensuite vendue pour devenir un débit de boissons puis un restaurant "le Zig-Zag", toujours en activité en 2023.

M. Dutrevy est un homme discret et bienveillant mais qui a du mal à faire oublier la grande cordialité de son prédécesseur qui reprendra à sa suite le mandat de maire pour les 12 années suivantes.
Il ne nous a pas été possible de trouver trace des lieux et dates du décès de Gabriel Dutrevy ni de sa femme Elise.
La tombe de famille au cimetière de St Illide semble abandonnée depuis longtemps...
Voir photos de M. Dutrevy sur le site photos conscrits, classes 54 et 56.

Si M. Fleys est le plus connu des maires cités dans ce chapitre, Marcel Verniole en est sans doute le plus populaire.
Les électeurs de St Illide l'ont démontré en le choisissant pour maire pendant 30 ans, c'est-à-dire six mandats consécutifs, de 1971 à 2001.
Il est aussi le premier élu de St Illide désigné pour représenter le canton de St Cernin dont il sera le conseiller général pendant quatre mandats, soit 25 années de 1972 à 1998.
Marcel Verniole sera enfin le seul maire de St Illide à siéger au conseil régional d'Auvergne où il effectuera un mandat, parmi les huit délégués du département du Cantal.
Voilà un beau palmarès de popularité.

Marcel Verniole est né à St Illide en 1920. Pupille de la Nation en qualité d'orphelin de guerre, son père est mort des suites de son incarcération en Allemagne, Marcel Verniole doit interrompre ses études et tient pendant quelques années un commerce de vins et fromages près de Toulouse. Rapidement, il décide de revenir au pays et créé une coopérative  laitière au Bel-Air, là où il vit avec sa famille.
Après trois mandats d'adjoint au maire, il succède à son voisin Paul Cinqualbre en 1971.

Marcel Verniole est l'archétype du maire de terrain, toujours présent, attentif à tous, connaissant tous les dossiers, intervenant inlassable et persuasif à tous les niveaux.
Un maire souriant d'une simplicité exemplaire, accessible, quelque soit le problème à régler, qui ne ménage pas son temps ni ses déplacements.
Il a plus de 80 ans quand il se résigne en 2001 à céder sa charge à son adjoint et ami François Lachaze.
Il survivra encore quelques années, toujours au Bel Air, puis à l'ehpad de Reilhac où il meurt en septembre 2009, peu de temps avant l'ouverture de l'ehpad de St Illide, un des dossiers de son dernier mandat.

Qui ne se souvient à St Illide des tournées dominicales de Marcel et Eva Verniole, car sa femme était toujours à ses côtés ?
A vitesse lente, son véhicule faisait toujours le même circuit, comme une visite d'inspection ou plus sûrement un besoin de voir encore sa terre.
Départ du Bel-Air, passage dans le bourg de St Illide puis la route jusqu'à la gare et retour par Labontat. Plus de 20 kms.
A moins que ce ne soit en sens inverse.
A sa vitesse, on reconnaissait déjà le véhicule et son conducteur : c'était le maire qui regardait sa commune...